Le collier.

    Dans la baie des anges, j’arrivai dans la grande salle du conseil, un petit groupe de sept anges attendaient, chuchotant.

     - Ah ! Te voilà.  Cria Artus,  faisant un signe de la main.

     - Désolé, j’avais des réunions, j’espère ne pas vous avoir fait trop attendre. 

     - Non ! Nous allons former deux équipes de quatre.  Des corps sans vie présentant les signes caractérisés ont été repérés à environ cinquante lieux du logis de Claire. Je vais m’occuper de cette partie-là. Toi et ton équipe, vous allez retourner sur les lieux du crime et vous essaierez de trouver des indices. Tu partiras avec deux traqueurs, Emeric et Sacha. Et voici Kara qui peut transmettre par télépathie à des kilomètres de distance. Elle sera le lien qui reliera les deux groupes. Moi je pars avec Melia, sa sœur jumelle, Logan et Martin. 

     - Ok ! Que cherchons-nous exactement ? 

     - Deux choses : nous devons essayer de trouver des indices qui pourraient nous mener à eux ou à l’enfant. Il est important d’écouter les ragots des villes afin de faire un tri dans ce qui se raconte. 

     - Mais nous ne pouvons pas parcourir les villes  et interroger les gens ? 

     - Et bien les anges vont prévenir leurs élues qui laisserons trainer leurs oreilles pour nous, cependant nous devons être sur place. Les unificateurs ont fait faire quelque chose de très spécial et d’unique en son genre. Vous devez porter ceci. 

Artus se retourna vers le groupe et nous tendit à chacun une chaîne en argent. Au bout de celle-ci un pendentif représentant une paire d’ailes, avec une pierre de lune ovale en son centre. Chacun des membres prit son pendentif.  Mélia et Kara étaient ravies, les leurs présentaient le même motif, mais la chaîne était en or ; un bijou offert par les unificateurs, c’était tellement d’honneur. Les garçons, eux, avaient l’air moins ravis, mais on ne discute pas les ordres des unificateurs, et chacun mit son pendentif.

      - Ce n’est pas très discret, cette lumière. Dit Logan, en montrant la pierre scintillante au milieu du collier. Par ailleurs, je ne vois pas comment un bijou de fille peut changer la donne à notre principal souci.

     -  Je n’ai pas fini. Voici les instructions d’utilisation. Artus déroula un petit parchemin.

« Mes chers frères, mes chères sœurs, voici en ces temps de tourment, un outil de travail.

Une fois autour du cou, votre cristal devrait briller, signe qu’il est bien actif.

Il est impératif de trouver un endroit à l’abri des regards, pour utiliser cette pierre.

Une fois en sécurité, vous pressez son centre. La première transformation est un peu douloureuse, rassurez-vous c’est supportable.

Procédez de même pour récupérer vos ailes.

Attention, tout le temps que vous êtes sans ailes vous gardez vos dons. Mais vous avez les mêmes besoins qu’un humain : soif, faim, fatigue. Nous vous conseillons donc de ne pas trop rester dans cet état.

Bonne chance. Les Unificateurs.

     - Douloureux je ne ressens rien, c’est quoi cette histoire de transformation ? Martin appuya sur la pierre, rien ne se passait.

     - Ça ne fonctionne que sur terre, je pense. dit Artus

     - On va devoir manger, dormir ?  Dirent en cœur les jumelles.

     - Tout dépend du temps que vous resterez sans vos ailes. dit Artus.

     - Récupérer vos ailes ? Pardon, mais cela me choque, moi !  J’étais déjà dans un sentiment latent d’être bientôt banni et privé de mes ailes, qui me déplaisait fortement et maintenant ce collier allait les reprendre puis les redonner, la lettre parlait même de douleur ! J’étais anxieux, j’ajoutais ce ressenti à ma nouvelle palette de sentiments nouveaux.

     - Oui, je n’en sais pas plus que toi Satya, mais nous allons bientôt voir ce qu’il en est exactement.  Artus nous tournait de nouveau le dos à la recherche de quelque chose.

Tout le monde souriait, sauf moi. Artus tendit un sac à dos à chacun.

    - Prenez cela avec vous, ce sont des vêtements de ville. Voici une carte Satya. Sur la croix rouge, un pied-à-terre isolé, où vous devriez être tranquilles. Des questions ? Sans attendre de réponses, Artus enchaîna.

    - Parfait, alors on est parti, bonne chance à tous.  Il était évident que chacun avait des milliers de questions et qu’il ne pourrait pas y répondre.

Nous avons quitté les lieux, chaque groupe derrière son chef. En moins de dix minutes chacun se retrouvait à son point de départ sur terre. Le soleil était au zénith, c’était la pleine journée et il fallait rapidement se cacher. Je fis un signe de la tête à l’équipe, montrant un bosquet, près d’un petit mur en ruine. Caché derrière les arbres, on avait formé un cercle.

     -  Bon, il est temps de vérifier les miracles de ce collier, je vous propose de procéder chacun notre tour. Des regards inquiets étaient suspendus à mes lèvres, chacun espérant ne pas être le premier.

     -  Ok ! Je commence.  Mes compagnons, soulagés, m’encourageaient du regard.

Je dégageai mon cou et appuyai sur la petite pierre, mes ailes s’étendirent de tout leur long, faisant reculer les autres. Celle-ci renvoya un petit faisceau lumineux vers le ciel, mon corps se crispa, des cris  incontrôlables commencèrent à s’échapper de ma gorge.

Mes camarades  étaient terrifiés devant mes gémissements. Je venais de tomber à genou. Mes ailes se rétractèrent dans ma chair petit à petit, pour s’incruster dans mon dos, c’était stupéfiant. L’opération dura quelques instants qui me parurent une éternité.

J’étais  à présent allongé face contre terre, haletant. Il fallait vite que je me  ressaisisse, la douleur s’estompait doucement laissant place à une chaleur douce le long de chacune de mes omoplates. Le collier avait cessé de briller. Dans  mon dos, entre les ouvertures de mes vêtements où avant passaient mes ailes, une lumière diffuse s’échappait. Kara, Emeric et Sacha s’étaient penchés au-dessus de moi, essayant de voir d’où provenait la lumière.

        - J’aurais préféré une poudre de perlimpinpin qui aurait rendu invisible nos ailes. Dit courageusement Sacha.

       - Oui, moi aussi, est-ce-que ça va ? Tu as l’air secoué.  Ils étaient tous les trois, au-dessus de moi, inquiets.

      - Oui, ça va ! Un peu étourdi, je dois avouer. Je  m’étais assis afin de reprendre mes esprits.

      - Heu.., ton dos, il brille dans les ouvertures de ta toge.  Kara était collée à moi afin de voir ce qui se passait, pendant que je fouillais le sac, à la recherche de vêtements plus appropriés. Elle avait tendu le bras pour soulever le tissu. Le contact des doigts de Kara sur ma peau me fit de petits frissons. Je ne laissais pas transparaître la sensation ressentie. Personne d’autre que Claire n’avait été aussi intime avec moi. J’aurais rougi si j’avais su le faire, mais la lumière dans le dos s’en chargea pour moi. Sous l’effet de surprise Kara tomba sur les fesses et recula pour admirer le spectacle.

     - Oh ! Satya c’est magnifique, tu as deux ailes dorées tatouées dans le dos. 

     - Quoi ? dirent en chœur les garçons.

     - Oui, c’est trop classe dit Emeric, c’est marrant ça brille telle la pierre du collier, avec des intensités différentes.

     - En tout cas, c’est bizarre d’être sans ailes, je n’aime pas trop ça je crois. Bon, assez perdu de temps, au suivant !

Chacun leur tour, Emeric et Sacha procédèrent à la métamorphose. Kara se mit un peu à l’écart et en fit autant. Je trouvais cela épatant, les ailes disparaissaient et s’incrustaient en dessin lumineux sur leur peau. Les cris que chacun avait poussé resteraient gravés à jamais dans ma mémoire, j’appréhendais déjà la prochaine permutation, j’espérais qu’elle serait effectivement moins douloureuse. Une fois prêts, nous nous sommes rendus au lieu dit : la croix rouge de la carte.